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Je suis en colère et profondément dégoûté.

Publié le par Mikeulponk

Les résultats sont tombés.
Macron : 27,80%
Lepen : 23,10%
Mélenchon : 22%

1,10%, c'est ce qui a manqué au seul candidat de gauche capable d'atteindre le second tour,  pour être une option contre la droite extrême et l'extrême droite.

J'avais terminé mon précédent post sur cette citation de Bertolt Brecht (dramaturge et poète antinazi) :
« Nos défaites d'aujourd'hui ne prouvent rien, si ce n'est que nous sommes trop peu dans la lutte contre l'infamie, et de ceux qui nous regardent en spectateurs, nous attendons au moins qu'ils aient honte. »
À ceux qui diront qu'ils ont déjà entendu ça 100 fois, et bah on le répétera encore 100 fois pour que ça rentre.

Je suis en colère et profondément dégoûté.
Je ne suis pas en colère contre les macronistes ou les lepenistes.
Ce sont mes ennemis. Je n'ai que mépris pour ces personnes sans cœur et égoïstes. Je les hais et les combat déjà suffisamment tout le temps.

Je ne suis pas en colère contre les personnes qui se sont abstenues, en général.
Il y en a qui ont mieux fait de s'abstenir plutôt que de faire n'importe quoi.
Quand on n'a pas tous les éléments pour comprendre la politique, qu'on ne pige pas tous les tenants et aboutissants, il vaut mieux se retenir que de faire un geste guidé par la panique ou des conditionnements que l'on ne maitrise pas (On sait que le ressentiment favorise les fachos). Et je félicite même les gens de droite, à qui il reste encore un peu d'empathie, qui se sont abstenus pour ne pas contribuer à détruire la vie des plus vulnérables.

Je suis en colère contre les personnes qui se revendiquent de gauche, qui ont tous les outils pour réaliser le niveau critique de la situation, et qui ont considéré quand même qu'il n'y avait pas urgence et qu'on pouvait bien supporter encore cinq années de macronisme avec le frisson d'un risque Lepen (on ne sais pas encore, quel suspens).

Celleux qui prétendaient que les jeux étaient faits vont devoir réfléchir au coût de leur désinvestissement. De leur impuissance acquise. Si c'est votre cas, vous vous êtes trompés.
La gauche pouvait passer, notamment parce que Zemmour siphonnait Lepen.
Et si une telle occasion ne se représentait pas? (Voir la fable du Héron, ce qui ne dispense pas d'être exigeant).
Celleux qui ont plus peur de Mélenchon que de Macron ou Lepen devraient aussi questionner leur confort.
À toutes les personnes de "gauche" pour qui la violence du quinquennat Macron n'était pas suffisante pour mettre son égo de côté, quel sang-froid.
Pendant ces cinq prochaines années, se diront-elles, en voyant la police massacrer tout ce qui bouge, les réfugiés se noyer, être internés dans des camps, et continuer de subir toutes les maltraitances les plus indignes, les pauvres être encore plus misérables et asservis, les femmes, les personnes racisée, les musulmans et toutes les minorités encore plus précarisées et affaiblies, la démocratie fictive de plus en plus réduite, les mouvements sociaux encore plus brutalisés et empêchés de se développer, la liberté d'expression pilonnée, les guerres capitalistes se poursuivre et la cause écologiste stagner mortellement... "ça valait le coup d'attendre encore cinq ans de plus".

On peut douter que Mélenchon ait pu changé considérablement le système, mais il est certain qu'il ne s'y serait pas vautré dedans comme l'un ou l'autre des deux bourrins fascistoïdes.

Dans cinq ans, il y aura encore plus de boulot.
Beaucoup de gens vont souffrir d'ici là parce que certain.e.s n'étaient pas prêts à se résoudre à glisser un pauvre papelard dans une urne pour épargner aux plus démunis 1826 jours de calvaire supplémentaire.
Nous prenons ce second tour comme une condamnation.

Celleux qui sont si fier de leur radicalité militante et sûr de leur capacité à endurer la brutalité de nos ennemis : kiffez bien. Restez dans votre mythe autovalorisant.
"Ça va bien s'passer".

En tant qu'antifasciste, je suis dégouté de voir l'extrême droite et la droite extrême représenter une telle part des votes exprimés et de constater que la menace fasciste et capitaliste autoritaire ne semble pas assez forte pour convaincre les gauchistes de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour les empêcher de gagner du terrain.
Ils peuvent sans doute se le permettre.
En tant qu'anarchiste, je suis en colère contre tous ces philosophes bien propre, qui se sont épargnés la souillure du suffrage, qui peuvent supporter d'observer les conséquences de dix ans d'ultra-capitalisme au pouvoir en attendant le grand soir. Qui ont le luxe de snober une bataille qui ne leur rapportera aucune médaille.
Et après tout, ce n'est sans doute pas si grave, nous diront-ils.

C'est grave.

Celleux qui nous font des leçons de politique comme si on ne savait pas déjà que le système électoral est biaisé pour favoriser les riches et la majorité. Comme si on ne savait pas que le pouvoir corrompt et que nous ne pouvons pas faire confiance.
Pendant des années, l'alternance PS-RPR-UMP donnait raison à cette théorie abstentionniste.
Mais on devrait savoir mettre son logiciel à jour quand les circonstances évoluent.
Face à deux fachos, l'une un peu plus raciste, l'autre un peu plus capitaliste (c'est une nuance et pas une différence), il y avait un gauchiste réformiste (certes).
Là, face aux deux forcenés, il y avait matière à revoir sa copie cornée par l'usage.
Et voilà qu'on règle grossièrement l'affaire d'un revers de "tous pourris". Arrêtez les conneries! Un peu de lucidité et de discernement.
Mélenchon n'est pas équivalent à Macron ou Lepen. Le parti de gauche n'est pas mon ennemi. Au pire un allié encombrant.
Du point de vue de l'écologie, qui n'est pas un sujet parmi d'autre mais LE sujet primordial, elle sera carrément absente de ce second tour.

Au fond, je ne veux plus entendre parler de Mélenchon. Le problème n'est pas là!
On s'en bas les gonades de Mélenchon.
Au point où on en est, je préfère subir une mauvaise gauche que me prendre une bonne droite.
À l'issue de cette élection, de ce moment, nous ne nourrissions pas d'autre espoir que celui de ne pas nous compliquer la tâche. Celui de s'offrir, à peu de frais, une once de répit. Désolé que ça ne soit pas assez noble pour certain.e.s.

Le vote n'est pas une fin en soit. Ce n'est pas un geste politique signifiant. Ok.
Mais c'est une bataille, aussi méprisable soit-elle, qui a de lourdes conséquences.
Cette pureté militante nous coûte cher!
Si voter est un affaire si peu importante pour cette élite abstentionniste, pourquoi faire tant d'histoire pour s'en désinvestir?
Iels ont fait les fines bouches. N'aviez-vous pas la dalle?
À quoi sert un allié qui ne s'abaissent pas à ramasser la corde, pourtant à portée de main, pour vous aider à sortir du précipice auquel vous êtes suspendu, quand bien même cette corde ne serait pas assez longue à ses yeux.
Et on nous dira qu'il vaut mieux ne pas donner une corde qui risque céder et faire dégringoler le malheureux encore plus bas.
On excuse une non-assistance à personne en danger sur la base d'une crainte?
Macron et Lepen nous promettent de nous marcher sur les doigts de toute façon!
On refuse un maigre secours au profit d'une catastrophe certaine, pour éviter de se salir les mains.

Spéciale dédicace à Roussel et aux communistes d'apéro. Vous êtes les pires traitres.
2,30%. Ils ont fait perdre notre camp, pour la cause de qui et de quoi?
Eux, c'est quand y'a une chance que ça passe qu'ils décident de se barrer. Quel génie!
Il n'a pas été une seule fois question de communisme. C'était d'une ringardise gênante. Ils sont minables. Quelle déchéance.
Je ne veux plus entendre un coco qui a voté Roussel me parler d'union et de stratégie.
Je leur chie dessus.

Et nous ne parlerons pas de Jadot ou Hidalgo (Qui ont passé plus de temps à jouer la concurrence que la solidarité. Pour des petits profits d'appareil. Et qui chouinent pour qu'on leur fasse un don pour rembourser leur campagne solo).
Ça se faisait les chantres du rassemblement et quand il y a un candidat dont il est évident qu'il sera le mieux placé, il n'en est plus question. L'hypocrisie des socedem est pathologique.
Poutou et Artaud sont excusés. Le NPA défend des idées dont je suis plus proche. Lutte ouvrière m'indiffère par leur crédo concentré sur les travailleur.euse.s qui manque cruellement de modernité. Mais ces partis ont leur rôle et on ne compte pas sur eux pour ça.

Pour toutes celleux qui prétendent que la politique se passe partout ailleurs que dans une élection : allez vous faire coter en bourse.
On sait très bien que la politique c'est au quotidien, mais à quoi ça sert de nier que l'élection impacte énormément les conditions de ce quotidien.
Le militantisme, depuis cinq ans, n'a pas porté les résultats voulus. Malgré les importantes mobilisations. Nous sommes de moins en moins efficace avec ces vieilles méthodes. Le gouvernement a une grosse part de responsabilité. La répression d'état ne vous aura pas échapper.
Mes souvenirs et les vidéos me hantent. Les témoignages de gens qui se tiennent à l'écart des luttes par peur, ou diverses raisons incapacitantes, me rappellent que nous n'avons pas tous.tes les moyens de lutter dans la vie de tous les jours.
Et ça va être encore plus difficile pendant les cinq ans à venir.
Le traitement des manifestations, la chasse aux intellectuels et aux activistes, les lois qui permettent de persécuter les mouvements, la violence des condés, les procédure bâillon, l'inaction climatique... Allez! À l'attaque les héros!

Posez vous cette question :
Est-ce que ce qui vous a empêcher de vous résoudre à voter pour la gauche plutôt que de laisser passer la droite pétainiste n'a rien à voir avec :
(J'ai pépon dans cet article )

- Un aristocratisme?
Vous êtes au dessus de cette mascarade. Vous en sachez trop mieux. Une touche de mépris envers les gens qui se rabaissent à cet exercice, peut être parce qu'iels souffrent et que la moindre branche est bonne à saisir. Ils sont faibles? Le ventre aussi sait des choses. Macron ou Mélenchon, la droite vénère ou la gauche à papa, ça fait une différence quand on est au menu du premier et toutes les théories politiques ne mettent pas de bouffe dans l'assiette et ne lancent pas de bouées.

- Un individualisme affinitaire ?
Votre vote est identitaire. Il vous défini et est même intimement lié à votre image de vous-même. Quelle vanité. J'ai voté alors que je suis anarchiste. Je ne me sens pas moins anarchiste. Ça n'invalide pas tout ce que je fais le reste de mon temps. J'ai grillé une pauvre cartouche dans une mêlée générale. Un opportunisme, pour contribuer à me donner toutes les chances de poursuivre ma lutte dans des conditions les moins pourries possibles. C'était pas grave et ça aurait pu aider.

- Une éthique du salut moral ?
Vous êtes resté pures et immaculés. Un.e champion.ne authentique. Vous voulez une médaille? J'ai participé à la comédie électorale et je ne me sens pas rabaissé. (Les résultats prouvent qu'il y a avait de bonnes raisons de croire que le dénouement aurait pu pencher de notre côté). C'était un peu dégoutant, comme de manger avec ses doigts un truc gluant. Mais je vais me laver les mains avant de retourner bosser.

- Un déni des conjonctures politiques concrètes ?
Les victimes de la Macronie et celles du fascisme contemporain ne sont pas des catégories abstraites. Ce sont des vrais gens qui vont ramasser. Et ils vont être notre chaire à canon pour cinq ans de plus. Ils n'auraient pas été sauvés sous Mélenchon, personne ne chevauche de licorne. Mais du point de vue du sol, ça aurait fait une différence dans les corps et les assiettes. On perd du temps et on va perdre encore plus de terrain et d'énergie.


J'admet avoir été concerné par ces quatre raisons jusqu'en 2017. La menace de droite hardcore m'avait déjà poussé à sortir de mon petit catéchisme anar. Par nécessité. Je ne suis pas maso et je ne suis pas à l'aise avec l'aspect sacrificiel de la militance guerrière. "Subissons, notre vertue n'en sera que plus exemplaire". Je hais trop la religion pour ça.

Attendons-nous d'être assez désespérés?
Quelle garantie avons-nous que ce désespoir nous poussera à l'action ou nous fera nous écrouler d'épuisement?
C'est un pari dont le risque repose sur les vies des autres.
On préfère le sport viril de l'affrontement en pleine rue, avec des yeux qui giclent.
Une bonne révolution, ça se fait dans la sueur, le sang et les larmes. Il faut des martyres.
À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire.
Oui, voter n'est pas glorieux, c'est un peu minable. Certain.e.s font avec ce qu'iels ont. D'autres, avec tout ce qui passe. Quand on est en détresse, nous n'avons pas ce luxe de faire passer sa réputation avant sa survie.

Tout ce que disent les abstentionnistes sur le vote est vrai, en théorie (Je vous laisse en faire la liste, vous adorez ça). Mais si ce n'est pas mis en cohérence avec la réalité en rase-motte, ce n'est que science sans conscience. C'est plus prosaïque, moins épique, mais plus pertinent.
Il y avait une opportunité de favoriser notre camp et d'affaiblir le camp d'en face. Nous venons de la laisser passer de justesse. C'est déprimant.

Le second tour est un traquenard. Il ne reste plus que deux ennemis mortels et je n'irais pas participer à leur fausse compétition pour savoir sur qui ils vont taper en premier. Ce seront les musulmans, les étrangers ou les pauvres? Petit indice, beaucoup sont tout ça à la fois.

Voter, c'est abdiquer. Oui et non.
Oui, j'ai participé à ce truc mal foutu et pipé en résistant à cette petite voix exaltée et intransigeante, si réconfortante. Et alors? Ce n'est pas parce que j'ai usé de mon droit civique que j'ai octroyé mon soutien ou un quelconque mandat. Ce serait accorder trop d'importance à une règle que je méprise.
Les fachos sont antidémocrates et pourtant, ils ne rechignent pas à voter car ils méprisent ces institutions. Si nous sommes assez bêtes pour les laisser faire, ils vont se gêner.
Pourquoi avons-nous tant de scrupules?
Je suis anarchiste et antifasciste et je veux vaincre la droite par tous les moyens nécessaires.
Même le vote. En tout cas, lorsqu'il y a une opportunité de gauche (Le parti de gauche n'est pas le PS). La bataille a lieux de toute façon.

Celleux qui sont conscients de ce qu'est l'ultracapitalisme et le néo-fascisme et qui n'ont pas mit leur égo de côté pour voter à gauche contre la droite :
Sentez-vous coupables.
Saisissez la faute stratégique et morale.
Tirez-en les leçons. En bonne vieille séance autocritique, "camarade".
Continuez à penser, mais en connectant, cette fois-ci. Lâchez un peu l'égo. Rebranchez l'empathie.
Et ne nous cassez pas les miches avec votre blabla pour justifier votre passivité. Ça ne nous consolera pas ni n'atténuera ce qui va suivre. C'est loupé pour cette fois encore, percutez.

Celleux qui ont fait l'effort de renier un temps leur confort intello, c'était un beau geste.
Gardez cette abnégation.
Celleux  dont les intérêts les poussaient plus à droite, mais qui ont refusé d'être complices en retenant leur vote, c'est bien. Continuez comme ça.
Certain.e.s de mes proches ont renoncé à voter pour leur poulain afin de ne pas nous planter un couteau dans le dos, alors que certain.e.s de nos alliés nous ont laissé tombé.

Je suis dégouté et en colère.

Je vais retourner bosser, bien sûr, comme prévu.

Mais dans des conditions qui promettent d'être bien plus merdiques.

Voir impossibles.

Comme je l'ai déjà dit, si nous ne pouvions pas créer, nous serions des furieux.

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